118. Marian Plug

Née à Almelo en 1937

Près d’Aubrac (souvenir), 1964

Marian Plug se considère avant tout comme une peintre. Si elle a abordé la sérigraphie, la gravure et l’aquarelle, ses œuvres les plus importantes sont, selon elle, ses tableaux. Son sujet est exclusivement le paysage. Un paysage sans personnages, car ceux-ci distrairaient du véritable objet de son œuvre : « La figure humaine m’empêcherait de pouvoir travailler librement avec les abstractions également présentes dans le tableau. Je ne veux pas d’une vision aussi littérale et romantique de la nature1 ». Pourtant, certains ont pu qualifier son œuvre de romantique, le rapprocher de celui de Caspar David Friedrich (1774–1840)2.

Plug dit ne pas reproduire des lieux particuliers dans ses tableaux : presque toujours réalisés en atelier, ce sont des morceaux de peinture très travaillés composés de surfaces planes glissant les unes derrière les autres. Elle a observé dans la nature un motif qui lui a plu (sans faire de croquis préparatoire), y a réfléchi pendant longtemps, l’a digéré en quelque sorte, avant de peindre. Peindre est ainsi pour elle une activité très cérébrale : « J’utilise la nature pour en venir à un tableau3 ». Si l’abstraction est un concept l’intéressant, elle se défend pourtant aussi d’être un peintre abstrait4 et définit ainsi son travail : « Je pense que la frontière entre peinture abstraite et figurative n’est pas importante, c’est une division qui ne m’intéresse pas. L’abstraction que je ressens est aussi entrelacée, complètement incorporée dans la peinture et dans le caractère contemporain de mon travail. Je ne pense donc pas que ces peintures représentent des paysages au sens traditionnel du terme.5 »

Marian Plug aborde l’aquarelle comme quelque chose de vraiment différent de la peinture à l’huile6. Pour elle, c’est une activité beaucoup moins réfléchie, où elle se laisse porter par le moment. Cela est d’autant plus nécessaire pour représenter un sujet aussi fugace qu’un coucher de soleil. En quelques coups de pinceaux, elle a tracé ce paysage : un rond rouge figurant le soleil rougeoyant, contrastant sur le trait noir des montagnes, tandis qu’un village en contrebas est rendu par des formes géométriques, équilibrant le tout.

L’équilibre est particulièrement important chez Marian Plug7. Cette œuvre est très construite et la représentation est réduite à l’essentiel. Le sujet est reconnaissable, pourtant nous ne sommes pas loin de l’abstraction. Paradoxalement, l’angle de vue est plus panoramique que dans ses tableaux d’atelier, car elle n’a pas eu le temps d’intellectualiser son sujet8. Cette composition rappelle un tableau ainsi qu’une gravure réalisés en 1965, probablement inspirés par notre aquarelle et qui tirent encore davantage vers l’abstraction9. Peut-être, marquée par ce coucher de soleil, l’artiste a-t-elle continué à y réfléchir après avoir peint notre aquarelle.

Juliette Parmentier-Courreau

1Marian Plug dans Joost Meuwissen et Marian Plug, Schilderij en Onderwerp, Rotterdam, 2018, p. 11.

2Ibid. ; Gijsbert van der Wal, entretien avec Marian Plug, dans Gijsbert van der Wal, Ger Luijten et Rudi Fuchs, Marian Plug. Peintures et œuvres sur papier, cat. exp. Paris (Fondation Custodia), 2019, p. 29 : « Il a besoin de l’homme par exemple, tandis que je veux dissocier ma peinture de l’homme. »

3Van der Wal 2019, op. cit. (note 2), p. 75.

4Ibid., p. 25 : « Je ne suis pas un peintre abstrait, j’ai besoin de la représentation. Mais je l’utilise. Par-delà la figuration surgit le tableau. »

5Rudi Fuchs, « Surrounded by green », entretien avec Marian Plug, dans Joost Meuwissen (éd.), Marian Plug Paintings, Amsterdam, 2002, p. 306.

6Ibid., p. 69.

7Ibid., p. 60 : « Je veux bien suggérer l’idée de mouvement, mais je recherche toujours l’équilibre, le calme, l’image statique. »

8Marian Plug évoque cet aspect à propos de ses petits tableaux à l’huile peints à l’extérieur, plus rares, et qui donnent un angle de vision plus large : « Rendre les choses vraiment grandes, plates. Quelque chose que vous ne pouvez pas faire lorsque vous peignez d’après nature parce que vous disposez de peu de temps », Meuwissen et Plug, op. cit. (note 1), p. 5.

9Paysage près de Saint-Rémy (Paysage au soleil rouge), 1965, huile sur toile, 55 × 45 cm, Amersfoort, collection 1970 Rijksdienst voor het Cultureel Erfgoed ; Meuwissen 2002, op. cit. (note 5), n° 67 (p. 82-83) ; et Petits signes dans le paysage I, 1965, gravure sur bois, linogravure et impression en blanc, 175 × 145 mm, collection de l’artiste ; Van der Wal 2019, op. cit. (note 2), p. 10, repr.