Accueil Catalogues en ligne Un œil passionné. Douze ans d’acquisitions de Ger Luijten 127. Peter Vos Utrecht 1935 – 2010 Utrecht Carnet 333 vogels (« 333 oiseaux »), 1980-1981 Fasciné par les oiseaux, Peter Vos les dessina tout au long de sa vie1. Déjà lors de sa formation à la Rijksakademie van Beeldende Kunsten (Académie nationale des Beaux-Arts) d’Amsterdam à la fin des années 1950, il appréciait particulièrement les séances de dessin annuelles organisées au zoo Artis et garda cette méthode de travail, réalisant des vogeldagboeken (journaux d’oiseaux)2. Vos vivait principalement du dessin de presse et de l’illustration, à côté de projets plus personnels3. À partir de 1975, il se rendit régulièrement à Artis pour y dessiner des oiseaux. Cela aboutit à la publication en 1980 du livre Een studie in grijs (« Une étude en gris »), réunissant une centaine de dessins d’oiseaux4. Vos fut toutefois très déçu par le résultat imprimé et se lança dans un nouveau livre d’oiseaux, qui au départ n’était pas destiné à être publié5. La réalisation de ce livre, intitulé par la suite 333 oiseaux6, se déroula pendant 18 mois. De juin 1980 à décembre 1981, Vos travailla dans une maquette en blanc d’un livre imprimé de lettres de Gustave Flaubert rassemblées sous le titre Haat is deugd (« La haine est une vertu »), remplissant patiemment les pages de dessins d’oiseaux à l’encre de Chine rehaussée d’aquarelle7. Comme pour Een studie in grijs, il fit de nombreux croquis préparatoires sur le vif à Artis, les reprenant ensuite dans la maquette8. Le repentir n’était pas possible dans ce carnet car Vos s’interdisait de corriger ou d’arracher les feuilles moins réussies. Chaque page était laissée vierge au verso, à l’exception d’un numéro de planche et d’une identification des oiseaux représentés, en latin9. Le choix des espèces représentées dans cet ouvrage est très personnel. Plusieurs doubles-pages sont notamment consacrées aux chouettes et hiboux, ses oiseaux favoris10. Peter Vos désirait réaliser de véritables « portraits d’oiseaux11 », non comme des représentants d’une espèce mais en tant qu’individus12. Variant leurs poses et attitudes, il montre leurs personnalités : tantôt curieux, craintifs, méfiants ou encore endormis. Le coin en haut à droite de la double-page présentée à l’occasion de cette exposition témoigne également de sa manière de travailler : on y aperçoit l’esquisse au crayon d’un hibou jamais terminée. Ger Luijten notait que ces 333 oiseaux de Peter Vos étaient « tout sauf un carnet de croquis13 ». Il admirait tant ce véritable chef-d’œuvre que, dès 2018, il en annonçait sa publication sous la forme d’un fac-similé14, projet mené à bien en 2021, quarante ans après la réalisation de l’album. Juliette Parmentier-Courreau 1On les retrouve dans tout son œuvre, du dessin d’observation à celui d’imagination, parfois influencé par la mythologie, en passant par l’illustration. 2La Fondation Custodia en conserve un : inv. 2015-T.9 ; Ger Luijten dans Marie-Noëlle Grison, Marleen Ram, avec des contributions de Rhea Sylvia Blok, Hans Buijs et Ger Luijten, Art sur papier. Acquisitions récentes de la Fondation Custodia, cat. exp. Paris (Fondation Custodia), 2018, n° 78. 3L’ensemble de son œuvre a été catalogué par Jan Piet Filedt Kok et est accessible en ligne : Jan Piet Filedt Kok, RKD Studies. ABC Peter Vos : Prenten, tekeningen, brieven & boeken, 2017. 4Peter Vos, Een studie in grijs, Amsterdam, 1980. L’ouvrage est sous-titré Voorlopige balans van drie jaar vogeltekenen (« Bilan provisoire de trois années de dessins d’oiseaux »). C’est une méthode de travail familière à Peter Vos : déjà en 1962, il avait réalisé Honderd reigers (« Cent hérons »), maquette en blanc publiée sous forme de livre en 1969. 5Jan Piet Filedt Kok, « Comment Vos a réalisé Une maquette en blanc avec 333 oiseaux en 1980-1981 », dans Jan Piet Filedt Kok, Ger Luijten et Siegfried Woldhek, Peter Vos. 333 oiseaux, Paris, 2021, p. 35-36. 6Le titre initialement prévu pour cet ouvrage était : « Geen scheiding tussen oog en hand » (« Pas de division entre l’œil et la main ») ; Jan Piet Filedt Kok, ibid., p. 37. 7Chaque dessin d’oiseau est daté. La plus ancienne date est celle du 8 juin 1980, pour la planche 44, la dernière est le 28 décembre 1981, pour la planche 140 (Vos n’a pas rempli le carnet en suivant l’ordre des pages). La page de titre présente quant à elle la date de 1982. 8Dans les premiers temps, le dessin définitif était réalisé jusqu’à un mois après le croquis. Vos décida ensuite de les faire le jour-même pour en garder un souvenir plus frais. Il écrit en effet dans son journal que ses dessins sont périmés au bout d’un mois et qu’il en a notamment oublié la couleur ; Jan Piet Filedt Kok, op. cit. (note 5), p. 44. Les premiers dessins du livre comportent deux dates, celle du croquis originel et celle du dessin. 9Vos envisageait de réaliser un index à la fin de son ouvrage, mais ne mena pas à bien ce projet. Cet index a été établi pour le livret explicatif accompagnant le fac-similé de l’album : Filedt Kok, Luijten et Woldhek, 2021, op. cit. (note 5). 10Jan Piet Filedt Kok, dans Eddy de Jongh et Jan Piet Filedt Kok, avec la collaboration de Saïda Vos, Peter Vos – Métamorphoses, cat. exp. Paris (Institut Néerlandais), Amsterdam (Museum Het Rembrandthuis), 2013, p. 110. 11Selon l’expression de Ger Luijten, dans le titre de son essai : Ger Luijten, « Les portraits d’oiseaux de Peter Vos », dans Filedt Kok, Luijten et Woldhek, 2021, op. cit. (note 5), p. 7-18. 12Siegfried Woldhek, « Rencontres personnelles », dans Filedt Kok, Luijten et Woldhek, 2021, op. cit. (note 5), p. 34. 13Ger Luijten, op. cit. (note 11), p. 17. 14Luijten 2018, op. cit. (note 2), n° 79. 15« Une maquette avec 333 oiseaux dessinés par Peter Vos à Mokum [Amsterdam] 1982 ».
Fasciné par les oiseaux, Peter Vos les dessina tout au long de sa vie1. Déjà lors de sa formation à la Rijksakademie van Beeldende Kunsten (Académie nationale des Beaux-Arts) d’Amsterdam à la fin des années 1950, il appréciait particulièrement les séances de dessin annuelles organisées au zoo Artis et garda cette méthode de travail, réalisant des vogeldagboeken (journaux d’oiseaux)2. Vos vivait principalement du dessin de presse et de l’illustration, à côté de projets plus personnels3. À partir de 1975, il se rendit régulièrement à Artis pour y dessiner des oiseaux. Cela aboutit à la publication en 1980 du livre Een studie in grijs (« Une étude en gris »), réunissant une centaine de dessins d’oiseaux4. Vos fut toutefois très déçu par le résultat imprimé et se lança dans un nouveau livre d’oiseaux, qui au départ n’était pas destiné à être publié5. La réalisation de ce livre, intitulé par la suite 333 oiseaux6, se déroula pendant 18 mois. De juin 1980 à décembre 1981, Vos travailla dans une maquette en blanc d’un livre imprimé de lettres de Gustave Flaubert rassemblées sous le titre Haat is deugd (« La haine est une vertu »), remplissant patiemment les pages de dessins d’oiseaux à l’encre de Chine rehaussée d’aquarelle7. Comme pour Een studie in grijs, il fit de nombreux croquis préparatoires sur le vif à Artis, les reprenant ensuite dans la maquette8. Le repentir n’était pas possible dans ce carnet car Vos s’interdisait de corriger ou d’arracher les feuilles moins réussies. Chaque page était laissée vierge au verso, à l’exception d’un numéro de planche et d’une identification des oiseaux représentés, en latin9. Le choix des espèces représentées dans cet ouvrage est très personnel. Plusieurs doubles-pages sont notamment consacrées aux chouettes et hiboux, ses oiseaux favoris10. Peter Vos désirait réaliser de véritables « portraits d’oiseaux11 », non comme des représentants d’une espèce mais en tant qu’individus12. Variant leurs poses et attitudes, il montre leurs personnalités : tantôt curieux, craintifs, méfiants ou encore endormis. Le coin en haut à droite de la double-page présentée à l’occasion de cette exposition témoigne également de sa manière de travailler : on y aperçoit l’esquisse au crayon d’un hibou jamais terminée. Ger Luijten notait que ces 333 oiseaux de Peter Vos étaient « tout sauf un carnet de croquis13 ». Il admirait tant ce véritable chef-d’œuvre que, dès 2018, il en annonçait sa publication sous la forme d’un fac-similé14, projet mené à bien en 2021, quarante ans après la réalisation de l’album. Juliette Parmentier-Courreau 1On les retrouve dans tout son œuvre, du dessin d’observation à celui d’imagination, parfois influencé par la mythologie, en passant par l’illustration. 2La Fondation Custodia en conserve un : inv. 2015-T.9 ; Ger Luijten dans Marie-Noëlle Grison, Marleen Ram, avec des contributions de Rhea Sylvia Blok, Hans Buijs et Ger Luijten, Art sur papier. Acquisitions récentes de la Fondation Custodia, cat. exp. Paris (Fondation Custodia), 2018, n° 78. 3L’ensemble de son œuvre a été catalogué par Jan Piet Filedt Kok et est accessible en ligne : Jan Piet Filedt Kok, RKD Studies. ABC Peter Vos : Prenten, tekeningen, brieven & boeken, 2017. 4Peter Vos, Een studie in grijs, Amsterdam, 1980. L’ouvrage est sous-titré Voorlopige balans van drie jaar vogeltekenen (« Bilan provisoire de trois années de dessins d’oiseaux »). C’est une méthode de travail familière à Peter Vos : déjà en 1962, il avait réalisé Honderd reigers (« Cent hérons »), maquette en blanc publiée sous forme de livre en 1969. 5Jan Piet Filedt Kok, « Comment Vos a réalisé Une maquette en blanc avec 333 oiseaux en 1980-1981 », dans Jan Piet Filedt Kok, Ger Luijten et Siegfried Woldhek, Peter Vos. 333 oiseaux, Paris, 2021, p. 35-36. 6Le titre initialement prévu pour cet ouvrage était : « Geen scheiding tussen oog en hand » (« Pas de division entre l’œil et la main ») ; Jan Piet Filedt Kok, ibid., p. 37. 7Chaque dessin d’oiseau est daté. La plus ancienne date est celle du 8 juin 1980, pour la planche 44, la dernière est le 28 décembre 1981, pour la planche 140 (Vos n’a pas rempli le carnet en suivant l’ordre des pages). La page de titre présente quant à elle la date de 1982. 8Dans les premiers temps, le dessin définitif était réalisé jusqu’à un mois après le croquis. Vos décida ensuite de les faire le jour-même pour en garder un souvenir plus frais. Il écrit en effet dans son journal que ses dessins sont périmés au bout d’un mois et qu’il en a notamment oublié la couleur ; Jan Piet Filedt Kok, op. cit. (note 5), p. 44. Les premiers dessins du livre comportent deux dates, celle du croquis originel et celle du dessin. 9Vos envisageait de réaliser un index à la fin de son ouvrage, mais ne mena pas à bien ce projet. Cet index a été établi pour le livret explicatif accompagnant le fac-similé de l’album : Filedt Kok, Luijten et Woldhek, 2021, op. cit. (note 5). 10Jan Piet Filedt Kok, dans Eddy de Jongh et Jan Piet Filedt Kok, avec la collaboration de Saïda Vos, Peter Vos – Métamorphoses, cat. exp. Paris (Institut Néerlandais), Amsterdam (Museum Het Rembrandthuis), 2013, p. 110. 11Selon l’expression de Ger Luijten, dans le titre de son essai : Ger Luijten, « Les portraits d’oiseaux de Peter Vos », dans Filedt Kok, Luijten et Woldhek, 2021, op. cit. (note 5), p. 7-18. 12Siegfried Woldhek, « Rencontres personnelles », dans Filedt Kok, Luijten et Woldhek, 2021, op. cit. (note 5), p. 34. 13Ger Luijten, op. cit. (note 11), p. 17. 14Luijten 2018, op. cit. (note 2), n° 79. 15« Une maquette avec 333 oiseaux dessinés par Peter Vos à Mokum [Amsterdam] 1982 ».