Accueil Catalogues en ligne Un œil passionné. Douze ans d’acquisitions de Ger Luijten 17. Cornelis Pronk Amsterdam 1691 – 1759 Amsterdam La Chapelle du Saint-Sacrement de Solwerd Cette vue détaillée d’un paysage de la province de Groningue, dans le nord des Pays-Bas, est l’œuvre de l’artiste amstellodamois Cornelis Pronk (1691–1759). Ce dernier excella dans les vues topographiques, les dessins d’architecture et autres paysages de grande précision1. Outre l’exactitude de sa plume, son traitement de la lumière particulièrement sensible fait toujours l’objet d’un soin remarquable. Parallèlement à son œuvre d’artiste topographe2, Pronk fournit de nombreux dessins à la Compagnie néerlandaise des Indes Orientales. Envoyées en Chine et au Japon, ces feuilles étaient destinées à servir de modèles pour le décor de porcelaines exportées vers l’Europe. Dans ce paysage, l’horizon bas ménage une large place pour le ciel qui occupe les trois quarts supérieurs de la composition. Les motifs architecturaux, qui structurent habituellement ce type de dessin dans l’œuvre de l’artiste, sont ici relégués au rang de détails agrémentant la composition. De subtiles variations de lavis traduisent avec finesse les effets lumineux du paysage. Les annotations qui se lisent dans le bas de la feuille nous permettent de situer le lieu représenté. Au loin, les villages animant avec élégance la ligne d’horizon sont Holwerda et Marsum. À droite, on aperçoit la chapelle du Saint-Sacrement de Solwerd, construite en 1502 ou peu après et démolie en 1783. Nous nous trouvons tout au nord des Pays-Bas non loin d’Appingedam, ville représentée par l’artiste vraisemblablement à l’occasion du même voyage sur une feuille aujourd’hui conservée à Francfort3. L’atmosphère rurale des prairies baignées de soleil, sous un ciel d’été, est particulièrement bien saisie et l’attention portée aux détails du premier plan et au rendu de la lumière donnent au dessin une dimension proto-photographique. Un dessin de même composition est conservé au Groninger Museum4. Au milieu du premier plan est assis par terre un dessinateur coiffé d’un chapeau à corne en train de croquer le panorama qui s’offre à lui. La perspective à hauteur d’homme suggère que Pronk était lui-même assis dans l’herbe, à quelques mètres derrière son modèle. Ainsi, ce motif indiquerait que Cornelis Pronk aurait traversé la région en compagnie d’un confrère et qu’il l’a dessiné ici, dans ce champ, vu de dos. Avec poésie, Ger Luijten notait en 2013 que : « Tout absorbés qu’ils sont à leur tâche, on se dit [que les deux hommes] n’ont pas dû échanger plus que quelques mots et que leur silence ne devait être interrompu que par le bruit d’ailes laissé par le passage d’une oie cendrée ou les croassements de quelque échassier.5 » Marie-Liesse Choueiry 1Erik de Jong, Luuc Kooijmans et Hans Michiel Brokken, Pronk met pen en penseel. Cornelis Pronk (1691-1759) tekent Noord-Holland, cat. exp. Haarlem (Frans Hals Museum), 1997. 2Avec Abraham de Haen (1707–1748) et Jan de Beyer (1703–vers 1785), Cornelis Pronk a notamment participé largement à la réalisation de Het Verheerlykt Nederland (« Éloge des Pays-Bas »). Ce monumental ouvrage topographique documentant les Provinces-Unies est publié par Isaac Tirion de 1745 à 1774. 3Appingedam, plume et encre noire, lavis gris, 136 × 240 mm, Francfort, Graphische Sammlung im Städelschen Kunstinstitut, inv. 3117. 4Vue des environs d’Appingedam, plume et encre noire, lavis gris, 91 × 239 mm, Groningue, Groninger Museum, inv. 1937.1037, donné à Cornelis Pronk. 5Ger Luijten, « L’artiste et son propre reflet », E-News Fondation Custodia, n° 4, mars 2013, p. 3.
Cette vue détaillée d’un paysage de la province de Groningue, dans le nord des Pays-Bas, est l’œuvre de l’artiste amstellodamois Cornelis Pronk (1691–1759). Ce dernier excella dans les vues topographiques, les dessins d’architecture et autres paysages de grande précision1. Outre l’exactitude de sa plume, son traitement de la lumière particulièrement sensible fait toujours l’objet d’un soin remarquable. Parallèlement à son œuvre d’artiste topographe2, Pronk fournit de nombreux dessins à la Compagnie néerlandaise des Indes Orientales. Envoyées en Chine et au Japon, ces feuilles étaient destinées à servir de modèles pour le décor de porcelaines exportées vers l’Europe. Dans ce paysage, l’horizon bas ménage une large place pour le ciel qui occupe les trois quarts supérieurs de la composition. Les motifs architecturaux, qui structurent habituellement ce type de dessin dans l’œuvre de l’artiste, sont ici relégués au rang de détails agrémentant la composition. De subtiles variations de lavis traduisent avec finesse les effets lumineux du paysage. Les annotations qui se lisent dans le bas de la feuille nous permettent de situer le lieu représenté. Au loin, les villages animant avec élégance la ligne d’horizon sont Holwerda et Marsum. À droite, on aperçoit la chapelle du Saint-Sacrement de Solwerd, construite en 1502 ou peu après et démolie en 1783. Nous nous trouvons tout au nord des Pays-Bas non loin d’Appingedam, ville représentée par l’artiste vraisemblablement à l’occasion du même voyage sur une feuille aujourd’hui conservée à Francfort3. L’atmosphère rurale des prairies baignées de soleil, sous un ciel d’été, est particulièrement bien saisie et l’attention portée aux détails du premier plan et au rendu de la lumière donnent au dessin une dimension proto-photographique. Un dessin de même composition est conservé au Groninger Museum4. Au milieu du premier plan est assis par terre un dessinateur coiffé d’un chapeau à corne en train de croquer le panorama qui s’offre à lui. La perspective à hauteur d’homme suggère que Pronk était lui-même assis dans l’herbe, à quelques mètres derrière son modèle. Ainsi, ce motif indiquerait que Cornelis Pronk aurait traversé la région en compagnie d’un confrère et qu’il l’a dessiné ici, dans ce champ, vu de dos. Avec poésie, Ger Luijten notait en 2013 que : « Tout absorbés qu’ils sont à leur tâche, on se dit [que les deux hommes] n’ont pas dû échanger plus que quelques mots et que leur silence ne devait être interrompu que par le bruit d’ailes laissé par le passage d’une oie cendrée ou les croassements de quelque échassier.5 » Marie-Liesse Choueiry 1Erik de Jong, Luuc Kooijmans et Hans Michiel Brokken, Pronk met pen en penseel. Cornelis Pronk (1691-1759) tekent Noord-Holland, cat. exp. Haarlem (Frans Hals Museum), 1997. 2Avec Abraham de Haen (1707–1748) et Jan de Beyer (1703–vers 1785), Cornelis Pronk a notamment participé largement à la réalisation de Het Verheerlykt Nederland (« Éloge des Pays-Bas »). Ce monumental ouvrage topographique documentant les Provinces-Unies est publié par Isaac Tirion de 1745 à 1774. 3Appingedam, plume et encre noire, lavis gris, 136 × 240 mm, Francfort, Graphische Sammlung im Städelschen Kunstinstitut, inv. 3117. 4Vue des environs d’Appingedam, plume et encre noire, lavis gris, 91 × 239 mm, Groningue, Groninger Museum, inv. 1937.1037, donné à Cornelis Pronk. 5Ger Luijten, « L’artiste et son propre reflet », E-News Fondation Custodia, n° 4, mars 2013, p. 3.