Accueil Catalogues en ligne Un œil passionné. Douze ans d’acquisitions de Ger Luijten 31. Pierre-Antoine Demachy Paris 1728 – 1807 Paris Nuages au-dessus des toits du Louvre, vers 1784 En 2020, Gerhard Greidanus, ancien trésorier de la Fondation Custodia, et son épouse ont offert cette esquisse de Pierre Demachy1 à notre institution, en hommage au grand amateur d’art Jan Maarten Boll récemment disparu2. Il leur a semblé, en concertation avec Ger Luijten, que le sujet de ce petit tableau – les toits du Louvre3 –, sa technique – une huile sur papier – et sa rareté en faisaient une œuvre de choix pour rejoindre nos collections. Formé auprès du scénographe florentin Giovanni Niccolò Servandoni (1695–1766), Demachy garda tout au long de sa longue carrière le goût pour les grands décors et les ruines. Il fut agréé peintre d’architecture en 1775 et le titre de son morceau de réception, Ruines d’architectures4, présenté trois ans plus tard, définit parfaitement le genre dans lequel il excella toute sa vie. Maître de la perspective5, Demachy choisit souvent de mêler des éléments de fantaisie à ses vues topographiques. C’est ce que l’on voit dans ses nombreuses vues d’architectures parisiennes présentées au Salon de 1793 à 1844, et notamment dans ses tableaux représentant le dégagement de la colonnade du Louvre. Il fut de fait l’un des témoins privilégiés des transformations du palais du Louvre puisqu’il y résida depuis 17696 et jusqu’en 18067. Parmi ses célèbres voisins, on recense Hubert Robert (1733–1808), peintre de ruines comme lui, et auquel il est souvent comparé. C’est probablement un peu avant les transformations des toitures du Louvre dans les années 1784-1785 qu’il réalisa cette vue des toits. À l’image de ses grandes compositions, souvent mises en scène sous des ciels couverts, l’artiste utilisa une même formule pour cette œuvre de petites dimensions : privilégiant un point de vue en légère contre-plongée, il s’attacha à décrire, avec une palette réduite sur un dessin sous-jacent, des nuages d’orages qui font place à une trouée de ciel bleu dans un jeu de lumière savant. Cette esquisse est l’une des rares études à l’huile sur papier attribuées avec certitude à Demachy. En 2014, dans le catalogue qui remit à l’honneur le peintre « védustiste »8, l’historienne de l’art Marie Petkowska-Le Roux rendit compte de son inventaire après décès9 et y nota trois grands volumes d’esquisses collées et un autre portefeuille d’esquisses. Si cette mention témoigne de l’attachement de l’artiste à ces études, la prisée de 15 francs indique, elle, qu’en 1807, elles n’étaient plus en vogue. Ce désintérêt de l’époque a peut-être décidé de leur sort. Laurence Lhinares 1De Machy selon son acte de baptême. 2Jan Maarten Boll (1942–2020) avocat, membre du Conseil d’État, et officier de l’ordre d’Orange-Nassau, a été membre puis président de la Vereniging Rembrandt et également membre de nombreux conseils de surveillance de divers musées. Il a reçu en 2009 la médaille des musées néerlandais. 3Ger Luijten avait l’idée d’organiser un jour une exposition sur les vues de Paris. 4Un temple en ruine, huile sur toile, 161 × 129 cm, Paris, musée du Louvre, inv. 6409. 5Il fut professeur de perspective à l’Académie de 1784 à 1807. 6En 1784, il logea précisément au premier étage de l’aile Henri II, aujourd’hui dénommée aile Lescot. 7En application du décret du 1er avril 1805 ordonné par Napoléon, les artistes et leurs ateliers durent quitter les lieux. 8Françoise Roussel-Leriche et Marie Petkowska Le Roux (dir.), Le témoin méconnu, Pierre-Antoine Demachy, cat. exp. Versailles (musée Lambinet), 2014. 9Françoise Roussel-Leriche, « Pierre-Antoine Demachy, une vie » dans Roussel-Leriche et Petkowska Le Roux 2014, op. cit. (note 8), p. 57.
En 2020, Gerhard Greidanus, ancien trésorier de la Fondation Custodia, et son épouse ont offert cette esquisse de Pierre Demachy1 à notre institution, en hommage au grand amateur d’art Jan Maarten Boll récemment disparu2. Il leur a semblé, en concertation avec Ger Luijten, que le sujet de ce petit tableau – les toits du Louvre3 –, sa technique – une huile sur papier – et sa rareté en faisaient une œuvre de choix pour rejoindre nos collections. Formé auprès du scénographe florentin Giovanni Niccolò Servandoni (1695–1766), Demachy garda tout au long de sa longue carrière le goût pour les grands décors et les ruines. Il fut agréé peintre d’architecture en 1775 et le titre de son morceau de réception, Ruines d’architectures4, présenté trois ans plus tard, définit parfaitement le genre dans lequel il excella toute sa vie. Maître de la perspective5, Demachy choisit souvent de mêler des éléments de fantaisie à ses vues topographiques. C’est ce que l’on voit dans ses nombreuses vues d’architectures parisiennes présentées au Salon de 1793 à 1844, et notamment dans ses tableaux représentant le dégagement de la colonnade du Louvre. Il fut de fait l’un des témoins privilégiés des transformations du palais du Louvre puisqu’il y résida depuis 17696 et jusqu’en 18067. Parmi ses célèbres voisins, on recense Hubert Robert (1733–1808), peintre de ruines comme lui, et auquel il est souvent comparé. C’est probablement un peu avant les transformations des toitures du Louvre dans les années 1784-1785 qu’il réalisa cette vue des toits. À l’image de ses grandes compositions, souvent mises en scène sous des ciels couverts, l’artiste utilisa une même formule pour cette œuvre de petites dimensions : privilégiant un point de vue en légère contre-plongée, il s’attacha à décrire, avec une palette réduite sur un dessin sous-jacent, des nuages d’orages qui font place à une trouée de ciel bleu dans un jeu de lumière savant. Cette esquisse est l’une des rares études à l’huile sur papier attribuées avec certitude à Demachy. En 2014, dans le catalogue qui remit à l’honneur le peintre « védustiste »8, l’historienne de l’art Marie Petkowska-Le Roux rendit compte de son inventaire après décès9 et y nota trois grands volumes d’esquisses collées et un autre portefeuille d’esquisses. Si cette mention témoigne de l’attachement de l’artiste à ces études, la prisée de 15 francs indique, elle, qu’en 1807, elles n’étaient plus en vogue. Ce désintérêt de l’époque a peut-être décidé de leur sort. Laurence Lhinares 1De Machy selon son acte de baptême. 2Jan Maarten Boll (1942–2020) avocat, membre du Conseil d’État, et officier de l’ordre d’Orange-Nassau, a été membre puis président de la Vereniging Rembrandt et également membre de nombreux conseils de surveillance de divers musées. Il a reçu en 2009 la médaille des musées néerlandais. 3Ger Luijten avait l’idée d’organiser un jour une exposition sur les vues de Paris. 4Un temple en ruine, huile sur toile, 161 × 129 cm, Paris, musée du Louvre, inv. 6409. 5Il fut professeur de perspective à l’Académie de 1784 à 1807. 6En 1784, il logea précisément au premier étage de l’aile Henri II, aujourd’hui dénommée aile Lescot. 7En application du décret du 1er avril 1805 ordonné par Napoléon, les artistes et leurs ateliers durent quitter les lieux. 8Françoise Roussel-Leriche et Marie Petkowska Le Roux (dir.), Le témoin méconnu, Pierre-Antoine Demachy, cat. exp. Versailles (musée Lambinet), 2014. 9Françoise Roussel-Leriche, « Pierre-Antoine Demachy, une vie » dans Roussel-Leriche et Petkowska Le Roux 2014, op. cit. (note 8), p. 57.