Accueil Catalogues en ligne Un œil passionné. Douze ans d’acquisitions de Ger Luijten 34. Théodore Rousseau Paris 1812 – 1867 Barbizon Village près de la rivière Moselle, vers 1832 En 2020, l’exposition Sur le motif organisée conjointement par la National Gallery of Art de Washington, le Fitzwilliam Museum de Cambridge et la Fondation Custodia a permis de rapprocher trois œuvres de Théodore Rousseau issues de chacune de ces collections1. Ces trois vues ont été réalisées en plein air, même si le fini remarquable du panorama de Washington indique qu’il a été terminé en atelier, selon une pratique usuelle à cette époque. La proximité des motifs et la tonalité générale de chacune de ces œuvres semblent indiquer une même aire géographique, à laquelle se rattachent encore deux autres vues, découvertes sur le marché de l’art en 2018 et qui complètent cet ensemble2. Ce sont les inscriptions apposées au bas du tableau du Fitzwilliam Museum3 qui ont permis l’identification de la région. Elles désignent les villages de Richardménil, Flavigny et Méréville, tous localisés dans le sud de la Moselle, au sud de Nancy. Là encore, comme lors de son séjour en Auvergne (1830) ou en Normandie (1831), Rousseau longea les rivières qui serpentaient dans les vallées. Il dépeignit les paysages dans toute leur ampleur et s’attacha aussi à donner des vues resserrées de lieux-dits. La vue de la Fondation Custodia a été réalisée depuis un léger promontoire et l’intérêt de l’artiste se porta sur les toits des bâtiments qui émergent parmi les peupliers, les chênes sessiles, les gaulis et les buissons. La composition est encore structurée par des murets ou des enclos de verdure qui abritent les potagers et les jardins. La part du ciel, animé de nuages, est soigneusement réservée. L’artiste a su saisir la lumière qui éclaire le hameau et permet de distinguer les variations subtiles de la tonalité de la végétation. Tout cet équilibre donne à ce paysage un sentiment d’intemporalité. Datée des années 1830, peut-être en 1832, peu après que Rousseau a présenté son Paysage, site d’Auvergne4, cette vue rappelle qu’il avait retenu quelques recettes de Charles Rémond (1795–1875), son premier maître. Elle rend avant tout compte du talent précoce de ce pur paysagiste dont le nom reste lié à Barbizon. Laurence Lhinares 1Paysage panoramique près de la rivière Moselle, vers 1830, huile sur toile, 22,1 × 75,9 cm, Washington, National Gallery of Art, Chester Dale Fund, inv. 2003.40.1 ; Paysage panoramique près de la rivière Moselle, vers 1830-1840, huile sur toile, 26,6 × 56,1 cm, Cambridge, The Fitzwilliam Museum, acquis grâce au Anne Pertz and Charles Brinsley Marlay Funds, inv. PD.49-1956 ; et le tableau de la Fondation Custodia présenté ici. 2Ger Luijten, « Toits, fenêtres, cours et ruines », dans Ger Luijten, Mary Morton et Jane Munro (dir.), Sur le motif. Peindre en plein air 1780-1870, cat. exp. Washington (National Gallery of Art), Paris (Fondation Custodia), Cambridge (Fitzwilliam Museum), 2020-2022, p. 177, fig. 71 et fig. 72. 3Op. cit. (note 1) et Luijten 2020-2022, op. cit. (note 2), p. 178. 4Salon de 1831, no 1854.
En 2020, l’exposition Sur le motif organisée conjointement par la National Gallery of Art de Washington, le Fitzwilliam Museum de Cambridge et la Fondation Custodia a permis de rapprocher trois œuvres de Théodore Rousseau issues de chacune de ces collections1. Ces trois vues ont été réalisées en plein air, même si le fini remarquable du panorama de Washington indique qu’il a été terminé en atelier, selon une pratique usuelle à cette époque. La proximité des motifs et la tonalité générale de chacune de ces œuvres semblent indiquer une même aire géographique, à laquelle se rattachent encore deux autres vues, découvertes sur le marché de l’art en 2018 et qui complètent cet ensemble2. Ce sont les inscriptions apposées au bas du tableau du Fitzwilliam Museum3 qui ont permis l’identification de la région. Elles désignent les villages de Richardménil, Flavigny et Méréville, tous localisés dans le sud de la Moselle, au sud de Nancy. Là encore, comme lors de son séjour en Auvergne (1830) ou en Normandie (1831), Rousseau longea les rivières qui serpentaient dans les vallées. Il dépeignit les paysages dans toute leur ampleur et s’attacha aussi à donner des vues resserrées de lieux-dits. La vue de la Fondation Custodia a été réalisée depuis un léger promontoire et l’intérêt de l’artiste se porta sur les toits des bâtiments qui émergent parmi les peupliers, les chênes sessiles, les gaulis et les buissons. La composition est encore structurée par des murets ou des enclos de verdure qui abritent les potagers et les jardins. La part du ciel, animé de nuages, est soigneusement réservée. L’artiste a su saisir la lumière qui éclaire le hameau et permet de distinguer les variations subtiles de la tonalité de la végétation. Tout cet équilibre donne à ce paysage un sentiment d’intemporalité. Datée des années 1830, peut-être en 1832, peu après que Rousseau a présenté son Paysage, site d’Auvergne4, cette vue rappelle qu’il avait retenu quelques recettes de Charles Rémond (1795–1875), son premier maître. Elle rend avant tout compte du talent précoce de ce pur paysagiste dont le nom reste lié à Barbizon. Laurence Lhinares 1Paysage panoramique près de la rivière Moselle, vers 1830, huile sur toile, 22,1 × 75,9 cm, Washington, National Gallery of Art, Chester Dale Fund, inv. 2003.40.1 ; Paysage panoramique près de la rivière Moselle, vers 1830-1840, huile sur toile, 26,6 × 56,1 cm, Cambridge, The Fitzwilliam Museum, acquis grâce au Anne Pertz and Charles Brinsley Marlay Funds, inv. PD.49-1956 ; et le tableau de la Fondation Custodia présenté ici. 2Ger Luijten, « Toits, fenêtres, cours et ruines », dans Ger Luijten, Mary Morton et Jane Munro (dir.), Sur le motif. Peindre en plein air 1780-1870, cat. exp. Washington (National Gallery of Art), Paris (Fondation Custodia), Cambridge (Fitzwilliam Museum), 2020-2022, p. 177, fig. 71 et fig. 72. 3Op. cit. (note 1) et Luijten 2020-2022, op. cit. (note 2), p. 178. 4Salon de 1831, no 1854.