Accueil Catalogues en ligne Enfants du Siècle d’or 36. Jan Antonisz van Ravesteyn La Haye vers 1572 – 1657 La Haye Portrait de Hugo Grotius, à l’âge de seize ans, 1599 Du haut de ses seize ans, ce tout jeune homme arbore déjà une physionomie d’adulte. Il est vrai qu’au XVIIe siècle l’espérance de vie était beaucoup plus courte et que l’on commençait à travailler bien plus jeune que de nos jours. Toutefois, le modèle de ce portrait est un personnage d’exception, particulièrement précoce. Ce regard sérieux et pensif, perdu dans le vague, n’est autre que celui de Grotius, le nom latin d’Hugo de Groot (1583-1645), l’un des plus grands intellectuels que connut le Siècle d’or hollandais1. Il était juriste. On le dit père du droit international et du droit maritime et il est aujourd’hui encore étudié dans les facultés. En 1599, le « Miracle d’Hollande » comme on l’avait surnommé en France, revenait tout juste d’une ambassade auprès du roi Henri IV lorsqu’il se fit portraiturer. Au cours de son séjour, il avait reçu un doctorat de l’université d’Orléans et ce, alors qu’il avait déjà soutenu deux thèses à Leyde dès l’âge de quatorze ans. À son retour de France, Grotius s’installa comme juriste et avocat à La Haye et entama sa brillante carrière. Il connaissait sans doute le peintre Jan van Ravesteyn à qui il confia le soin d’immortaliser ses traits2. Quatre ans plus tard, Grotius lui commanda un second portrait, qui fut gravé et largement diffusé. Cette dernière effigie est beaucoup plus convenue, traditionnelle, que le présent tableau, dont le format circulaire, en tondo, et la présentation rapprochée du modèle évoquent l’art des médailles. Hugo Grotius n’est cependant pas de profil, mais vu de trois-quarts, détournant son intense regard du spectateur, ce qui confère un caractère informel à la représentation. C’est un choix inusité pour un portrait peint en 1599, aussi peu habituel que cette stylisation maniériste des cils et des paupières du modèle3. Cette œuvre est le premier tableau connu de la main du peintre Jan van Ravesteyn, qui fut, durant plusieurs décennies, le portraitiste le plus en vue de La Haye. Il reçut d’importantes commandes et peignit notamment des groupes de miliciens, genre pictural si caractéristique de la jeune République des Pays-Bas. Entre ce tableau et les autres œuvres connues de Van Ravesteyn, il y a un hiatus que les historiens de l’art n’ont pas encore comblé : dix ans s’écoulent durant lesquels le peintre est passé de ce format si singulier à des représentations beaucoup plus conventionnelles, au parfait diapason avec leur temps. CT 1Hugo de Groot est une figure si importante du Siècle d’or néerlandais que ce portrait a été prêté au Rijksmuseum d’Amsterdam, à l’occasion de sa réouverture en 2013 et jusqu’en 2016. 2Grotius s’était déjà fait portraiturer peu avant, à l’âge de quinze ans, par Jacques de Gheyn II (1565-1629) qui en fit un dessin à la pointe de métal et une gravure ; voir cat. 21 et Buijs 2002, sous n° 26, p. 148-149. 3Autour de 1600, on trouve quelques portraits au format et à l’approche stylistique comparables chez les peintres Pieter Pietersz. (vers 1541-1603) à Amsterdam et, à Haarlem, chez Cornelis Ketel (1548-1616) et Cornelis Cornelisz. (1562-1638). Voir Buijs 2002, sous n° 26, p. 149.
Du haut de ses seize ans, ce tout jeune homme arbore déjà une physionomie d’adulte. Il est vrai qu’au XVIIe siècle l’espérance de vie était beaucoup plus courte et que l’on commençait à travailler bien plus jeune que de nos jours. Toutefois, le modèle de ce portrait est un personnage d’exception, particulièrement précoce. Ce regard sérieux et pensif, perdu dans le vague, n’est autre que celui de Grotius, le nom latin d’Hugo de Groot (1583-1645), l’un des plus grands intellectuels que connut le Siècle d’or hollandais1. Il était juriste. On le dit père du droit international et du droit maritime et il est aujourd’hui encore étudié dans les facultés. En 1599, le « Miracle d’Hollande » comme on l’avait surnommé en France, revenait tout juste d’une ambassade auprès du roi Henri IV lorsqu’il se fit portraiturer. Au cours de son séjour, il avait reçu un doctorat de l’université d’Orléans et ce, alors qu’il avait déjà soutenu deux thèses à Leyde dès l’âge de quatorze ans. À son retour de France, Grotius s’installa comme juriste et avocat à La Haye et entama sa brillante carrière. Il connaissait sans doute le peintre Jan van Ravesteyn à qui il confia le soin d’immortaliser ses traits2. Quatre ans plus tard, Grotius lui commanda un second portrait, qui fut gravé et largement diffusé. Cette dernière effigie est beaucoup plus convenue, traditionnelle, que le présent tableau, dont le format circulaire, en tondo, et la présentation rapprochée du modèle évoquent l’art des médailles. Hugo Grotius n’est cependant pas de profil, mais vu de trois-quarts, détournant son intense regard du spectateur, ce qui confère un caractère informel à la représentation. C’est un choix inusité pour un portrait peint en 1599, aussi peu habituel que cette stylisation maniériste des cils et des paupières du modèle3. Cette œuvre est le premier tableau connu de la main du peintre Jan van Ravesteyn, qui fut, durant plusieurs décennies, le portraitiste le plus en vue de La Haye. Il reçut d’importantes commandes et peignit notamment des groupes de miliciens, genre pictural si caractéristique de la jeune République des Pays-Bas. Entre ce tableau et les autres œuvres connues de Van Ravesteyn, il y a un hiatus que les historiens de l’art n’ont pas encore comblé : dix ans s’écoulent durant lesquels le peintre est passé de ce format si singulier à des représentations beaucoup plus conventionnelles, au parfait diapason avec leur temps. CT 1Hugo de Groot est une figure si importante du Siècle d’or néerlandais que ce portrait a été prêté au Rijksmuseum d’Amsterdam, à l’occasion de sa réouverture en 2013 et jusqu’en 2016. 2Grotius s’était déjà fait portraiturer peu avant, à l’âge de quinze ans, par Jacques de Gheyn II (1565-1629) qui en fit un dessin à la pointe de métal et une gravure ; voir cat. 21 et Buijs 2002, sous n° 26, p. 148-149. 3Autour de 1600, on trouve quelques portraits au format et à l’approche stylistique comparables chez les peintres Pieter Pietersz. (vers 1541-1603) à Amsterdam et, à Haarlem, chez Cornelis Ketel (1548-1616) et Cornelis Cornelisz. (1562-1638). Voir Buijs 2002, sous n° 26, p. 149.