Accueil Catalogues en ligne Un œil passionné. Douze ans d’acquisitions de Ger Luijten 49. Carl Blechen Cottbus 1798 – 1840 Berlin Vue de la côte baltique, 1834 (?) Carl Blechen apparaît comme le plus important des peintres allemands qui, au début du XIXe siècle, s’adonnaient à l’esquisse de paysage à l’huile. Après des débuts professionnels modestes comme employé de banque, Blechen intégra l’Académie de Berlin en 1822. Au cours de l’été 1823, il fit un voyage d’études à Dresde et ses rencontres avec Johan Christian Dahl (1788–1857) et Caspar David Friedrich (1774–1840) eurent sur son travail une influence durable. Les études à l’huile réalisées par Dahl, notamment en Italie, poussèrent Blechen à travailler lui-même en plein air. En 1828-1829, Blechen effectua le voyage en Italie tant attendu. Il revint à Berlin ramenant avec lui nombre de dessins et esquisses exécutés en plein air avec une remarquable liberté, et qui devaient laisser une marque sur son travail et son approche du paysage. Cette petite huile sur panneau fut probablement exécutée quelques années plus tard lors d’un voyage de l’artiste sur la côte baltique en 1834, dont on ne connaissait jusqu’alors que des dessins1. C’est une restitution soignée et lumineuse d’un motif somme toute peu spectaculaire. De délicates touffes d’herbe et un bosquet de jeunes arbres sont encadrés à gauche par le sable, et à droite par une zone marécageuse, la mer étant évoquée par une simple ligne bleu azur à l’horizon. L’artiste a eu besoin de très peu de peinture pour représenter ce petit panorama, et le travail frais sur frais contribue à restituer l’humidité du lieu. Les travaux plus formels de Blechen comprennent des paysages d’une grande charge émotionnelle, inspirés par le romantisme allemand. Mais la réputation qui devait ensuite s’attacher à lui se fonde sur ses études spontanées qu’il réalise d’une nature sans artifice, souvent en format horizontal étiré, semblables à l’œuvre ici exposée. En 1932, Ludwig Justi écrivait dans son guide de la Nationalgalerie : « Le caractère aléatoire de la réalité est considéré par ce peintre comme suffisamment digne – comme l’annonça bien plus tard au monde la doctrine impressionniste : un coin de la nature vu à travers un tempérament2 ». Grâce à la recommandation de l’architecte Karl Friedrich Schinkel (1781–1841), Blechen fut nommé professeur de peinture de paysage à l’Académie de Berlin en 1831, mais il fut contraint de démissionner à la fin des années 1830 en raison de crises sévères de dépression dont il ne se remit jamais. Il mourut en 1840 et l’État allemand se porta acquéreur de la quasi-totalité de ses esquisses à l’huile lors de sa vente après décès. Elles sont aujourd’hui conservées à Berlin, à la Nationalgalerie et à l’Académie3. Alice-Anne Tod 1Guido Joseph Kern, dans sa biographie de Blechen (Karl Blechen, sein Leben und seine Werke, Berlin, 1911), suppose à tort que Blechen avait visité la côte baltique en 1828. Des recherches récentes indiquent cependant que la visite de Blechen a très probablement eu lieu en 1834, alors qu’il était accompagné de son élève Heinrich Gätke (1814–1897) (notice en ligne d’un dessin de Blechen vendu par la galerie Daxer & Marschall, 2018 : https://daxermarschall.com/en/portfolio-view/carl-blechen-sold/) 2Ici, Justi cite le célèbre aphorisme d’Émile Zola : « Une œuvre d’art est un coin de la nature vu à travers un tempérament » ; Ludwig Justi, Von Runge bis Thoma, Berlin, 1932, p. 122. 3Voir les photographies sur le site internet de la Nationalgalerie de Berlin, section « Collections », qui figurent une présentation en salle de 1908 montrant les études de Blechen agencées en groupes aux côtés de grands paysages aboutis : Blick in die Ausstellung der Nationalgalerie, Raum 23, 1908, inv. ZA 2.17.1/00267 et ZA 2.17.1/00268.
Carl Blechen apparaît comme le plus important des peintres allemands qui, au début du XIXe siècle, s’adonnaient à l’esquisse de paysage à l’huile. Après des débuts professionnels modestes comme employé de banque, Blechen intégra l’Académie de Berlin en 1822. Au cours de l’été 1823, il fit un voyage d’études à Dresde et ses rencontres avec Johan Christian Dahl (1788–1857) et Caspar David Friedrich (1774–1840) eurent sur son travail une influence durable. Les études à l’huile réalisées par Dahl, notamment en Italie, poussèrent Blechen à travailler lui-même en plein air. En 1828-1829, Blechen effectua le voyage en Italie tant attendu. Il revint à Berlin ramenant avec lui nombre de dessins et esquisses exécutés en plein air avec une remarquable liberté, et qui devaient laisser une marque sur son travail et son approche du paysage. Cette petite huile sur panneau fut probablement exécutée quelques années plus tard lors d’un voyage de l’artiste sur la côte baltique en 1834, dont on ne connaissait jusqu’alors que des dessins1. C’est une restitution soignée et lumineuse d’un motif somme toute peu spectaculaire. De délicates touffes d’herbe et un bosquet de jeunes arbres sont encadrés à gauche par le sable, et à droite par une zone marécageuse, la mer étant évoquée par une simple ligne bleu azur à l’horizon. L’artiste a eu besoin de très peu de peinture pour représenter ce petit panorama, et le travail frais sur frais contribue à restituer l’humidité du lieu. Les travaux plus formels de Blechen comprennent des paysages d’une grande charge émotionnelle, inspirés par le romantisme allemand. Mais la réputation qui devait ensuite s’attacher à lui se fonde sur ses études spontanées qu’il réalise d’une nature sans artifice, souvent en format horizontal étiré, semblables à l’œuvre ici exposée. En 1932, Ludwig Justi écrivait dans son guide de la Nationalgalerie : « Le caractère aléatoire de la réalité est considéré par ce peintre comme suffisamment digne – comme l’annonça bien plus tard au monde la doctrine impressionniste : un coin de la nature vu à travers un tempérament2 ». Grâce à la recommandation de l’architecte Karl Friedrich Schinkel (1781–1841), Blechen fut nommé professeur de peinture de paysage à l’Académie de Berlin en 1831, mais il fut contraint de démissionner à la fin des années 1830 en raison de crises sévères de dépression dont il ne se remit jamais. Il mourut en 1840 et l’État allemand se porta acquéreur de la quasi-totalité de ses esquisses à l’huile lors de sa vente après décès. Elles sont aujourd’hui conservées à Berlin, à la Nationalgalerie et à l’Académie3. Alice-Anne Tod 1Guido Joseph Kern, dans sa biographie de Blechen (Karl Blechen, sein Leben und seine Werke, Berlin, 1911), suppose à tort que Blechen avait visité la côte baltique en 1828. Des recherches récentes indiquent cependant que la visite de Blechen a très probablement eu lieu en 1834, alors qu’il était accompagné de son élève Heinrich Gätke (1814–1897) (notice en ligne d’un dessin de Blechen vendu par la galerie Daxer & Marschall, 2018 : https://daxermarschall.com/en/portfolio-view/carl-blechen-sold/) 2Ici, Justi cite le célèbre aphorisme d’Émile Zola : « Une œuvre d’art est un coin de la nature vu à travers un tempérament » ; Ludwig Justi, Von Runge bis Thoma, Berlin, 1932, p. 122. 3Voir les photographies sur le site internet de la Nationalgalerie de Berlin, section « Collections », qui figurent une présentation en salle de 1908 montrant les études de Blechen agencées en groupes aux côtés de grands paysages aboutis : Blick in die Ausstellung der Nationalgalerie, Raum 23, 1908, inv. ZA 2.17.1/00267 et ZA 2.17.1/00268.