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60. Jan Saenredam

60. Jan Saenredam

Zaandam vers 1565 – 1607 Assendelft

La Parabole des vierges folles et vierges sages, 1606

Élève d’Hendrick Goltzius (1558–1617), père de Pieter Jansz. Saenredam (1597–1665), graveur de Cornelis Cornelisz. van Haarlem (1562–1638) ou encore de Karel van Mander (1548–1609), Jan Saenredam réalisa aussi des gravures de sa propre invention, telles que cette série des Vierges folles et des vierges sages. Extraite de l’évangile selon saint Matthieu, la parabole oppose cinq vierges, qui, dans leur sagesse, prévoient assez d’huile pour alimenter leurs lampes dans l’attente de l’époux, quand cinq autres, plus inconséquentes, négligent cette précaution. Obligées de se réapprovisionner chez les marchands, ces dernières manquent l’arrivée de l’époux et se voient refuser l’accès à la noce1.

Soucieux d’éviter toute linéarité dans la conduite de son récit, Saenredam fait preuve d’un sens aigu de la composition et d’une science du mouvement des corps qui n’ont rien à envier à ses confrères plus connus. L’artiste y déploie un jeu ingénieux de gradations dans la gestuelle, décomposant la parabole en une subtile chorégraphie. Ainsi, dans les deux premières estampes permettant d’illustrer les différences de caractères entre les jeunes femmes, Saenredam joue de l’opposition entre les corps statiques des vierges sages, assis ou appuyés contre un arbre et les corps mouvants et virevoltants des vierges folles. Le processus s’inverse dès la troisième estampe, pour l’épisode des lampes : c’est au tour des vierges sages de se trouver debout, se relayant à l’arrière-plan en un enchaînement d’attitudes parfaitement coordonnées pour approvisionner leurs lampes en huile quand deux vierges folles sont encore assises, démunies face à leurs lampes sur le point de s’éteindre. Si, dans la deuxième gravure, on pouvait se délecter de la grâce maîtrisée d’un pas de deux, on assiste à présent à une danse frénétique et affolée. À la parfaite synchronisation des poses entre la jeune femme au centre et celle de sa compagne à droite observée précédemment, succède dans cette troisième gravure une discordance dans les attitudes, une vierge folle se couvrant le visage d’un tissu quand une autre a contrario repousse celui d’un rideau de lit. On retrouve ce même jeu d’opposition entre harmonie et dissonance des gestes dans les deux dernières estampes.

Ainsi Saenredam compose-t-il chacune de ces cinq gravures comme autant d’actes d’un ballet, trahissant une maîtrise parfaite du langage dramatique des corps en mouvement. Un paradoxe lorsque l’on songe que c’est précisément par la danse qu’est dénoncée l’imprudence des vierges folles, tant dans l’illustration de la seconde gravure que dans le texte latin qui l’accompagne : « Des jeunes filles insensées s’ébattent / […] L’une d’elles s’épanouit en un geste souple, / et sans ménager la chaste pudeur, renverse le liquide huileux, l’insensée. / Ainsi surgit le mépris frivole de la Loi et de Dieu2 ».

Aude Prigot

1Évangile selon saint Matthieu, chapitre 25, versets 1 à 13.

2L’église calviniste néerlandaise du XVIIe siècle a souvent associé la pratique de la danse à l’immoralité. À ce sujet, voir Marina Nordera, « Travailler ou danser. L’iconographie des dix Vierges, (Pays-Bas, XVIe-XVIIe siècle) », Clio. Femmes, Genre, Histoire, vol. XLVI, 2017, p. 199-213. Traduction de Marina Nordera, p. 213, note 12.