8. David Bailly

Leyde 1584 – 1657 Leyde

Portrait d’un jeune garçon, 1626

Pendant une période relativement courte, le portraitiste et peintre de natures mortes David Bailly, établi à Leyde, s’est attaché à réaliser des portraits de ses concitoyens à la plume et à l’encre1. Environ trente-cinq de ces petites effigies sur papier ont été exécutées entre 1621 et 16332. Elles représentent pour la plupart des érudits et des scientifiques de la ville universitaire, parmi lesquels Daniël Heinsius (1580-1655) et Johan Rutgers (1584-1657), tous deux poètes et philosophes3, le théologien et linguiste Gerardus Joannes Vossius (1577-1649)4, le botaniste et écrivain Johan van Brosterhuysen (vers 1596-1650) et l’écrivain Jacob van der Burg (vers 1600-1659)5. On ne connait que peu de portraits d’enfants dessinés de la main de Bailly6, dont celui-ci.

Bailly a daté la plupart de ses portraits dessinés et en a également signé quelques-uns, mais il ne mentionnait jamais le nom des personnes représentées. Leur identification est souvent rendue possible par les inscriptions d’époque ou postérieures. Dans le cas de notre dessin, l’inscription au verso est cependant trompeuse. Hans Joostz. Overbeeck (1626-1690), dont le nom est cité dans cette note manuscrite du XVIIe siècle, ne peut en aucun cas être le garçon portraituré. Il est en effet établi que ce descendant de la famille de marchands Overbeeck, ou Overbeke, ne naquit qu’en 1626, date à laquelle Bailly réalisa ce dessin7. Le nom de son frère aîné, Joost (1620-1663), qui en 1626 pourrait s’être arrêté à Leyde pour une visite chez son oncle Matthijs van Overbeke (mort en 1638) et sa tante Agatha Scholiers (morte en 1649), a alors été avancé comme alternative8. Une autre possibilité est qu’il s’agisse en fait du propre fils de ce couple, Johannes van Overbeke (1616-1680), qui avait dix ans cette année-là – un âge qui pourrait être celui du garçon représenté ici9. Selon le collectionneur et biographe d’artistes Aernout van Buchel (1565-1641), deux portraits de Bailly étaient accrochés chez les Van Overbeke en 162810. On peut très bien imaginer qu’ils représentaient les maîtres des lieux et que ceux-ci aient aussi commandé à l’artiste un portrait de leur fils (unique à l’époque).

La tête du garçon est tracée d’une plume très fine, quelques hachures croisées dans le visage et de simples coups de pinceau pour les cheveux et les yeux. Une manière graphique de dessiner que Bailly a probablement apprise de Jacques de Gheyn II (1565-1629)11. L’importance accordée par l’artiste au rendu méticuleux du visage est soulignée par le style relâché dans le dessin du vêtement et du haut du corps. Bailly a utilisé deux couleurs d’encre différentes pour la tête et le buste, respectivement noire et brune. Elles expriment ici une différence de texture, tandis que dans d’autres de ses portraits dessinés cette combinaison d’encres agit plutôt de manière complémentaire.

MvS

1Quelques Amstellodamois, probablement en visite à Leyde, ont été aussi portraiturés par Bailly.

2La plus ancienne de ces œuvres – un portrait du peintre Jan Pynas – date de 1621 et se trouve aujourd’hui dans la collection des Harvard Art Museums, Harvard (Cambridge, MA), inv. 1.2018.206. Quelques dessins ont été transposés en gravure.

3The Morgan Library & Museum, New York, inv. I, 118 et I, 119, voir Jane Shoaf Turner, Dutch Drawings in the Pierpont Morgan Library : Seventeenth to Nineteenth Centuries, 2 vols., cat. coll., New York, 2006, nos 5 et 6.

4Rijksmuseum, Amsterdam, inv. RP-T-1963-259, voir Marijn Schapelhouman et Peter Schatborn, Dutch Drawings of the Seventeenth Century in the Rijksmuseum, Amsterdam. Artists born between 1580 and 1600, Amsterdam, Rijksmuseum et Londres, Merrell Holberton, 1998, n° 21.

5Les deux derniers font partie d’un double portrait conservé au Teylers Museum, Haarlem, inv. PP 0203.

6Graphische Sammlung im Städelschen Kunstinstitut, Francfort-sur-le-Main, inv. 1188  ; Klassik Stiftung Weimar, Weimar (Thuringe), inv. KK 4744  ; le dessin Portrait d’un garçon de quatorze ans conservé au Rijksmuseum, Amsterdam inv. RP-T-1881-A-126 est attribué à Bailly. Si l’attribution est exacte, il s’agirait de son tout premier dessin connu (1617), voir Schapelhouman et Schatborn 1998, n° 29.

7Documentation de la Fondation Custodia, Paris : Stichting Iconographisch Bureau, avril 1977.

8Cat. exp. New York/Paris 1977-1978, n° 4.

10Arnoldus Buchelius “Res pictoriae”. Aanteekeningen over kunstenaars en kunstwerken voorkomende in zijn Diarium, res pictoriae, notae quotidianae en descriptio urbis ultrajectinae (1583-1639), édité et commenté par G. J. Hoogewerff et J. Q. Van Regteren Altena, La Haye, 1928, p. 63 et 66. Rien ne permet d’établir avec certitude que les pendants dessinés, «  schilderijtjes in pen  », par Bailly d’un couple conservés à Leyde (inv. PK-1937-T-1 et 2), représentent Matthijs van Overbeke et Agatha Scholiers, voir Jef Schaeps et Jaap van der Veen (éds.), Leiden viert feest  ! Hoogtepunten uit een academische collectie, Leyde, Leiden Publications, 2014, n° 12.

11Selon Arnold Houbraken, voir De groote schouburgh der Nederlantsche konstschilders en schilderessen (1718).