Accueil Catalogues en ligne Un œil passionné. Douze ans d’acquisitions de Ger Luijten 87. Louis Cabat Paris 1812 – 1893 Paris Paysage à Narni avec un cavalier, 1838 Ce dessin a été choisi dans le fonds conséquent d’œuvres de Louis Cabat conservé à la Fondation Custodia et dont une large majorité a été acquise sous le directorat de Ger Luijten1. Il fut acheté auprès de la galeriste parisienne Chantal Kiener qui, dans la droite ligne de Pierre Miquel2, s’est évertuée à rendre à Cabat la place qu’il méritait dans le panorama des paysagistes français3. Fine connaisseuse de la période, elle rassembla tout au long de sa carrière des œuvres de l’artiste, en vendit et en donna un grand nombre à la Fondation Custodia. Tous les dessins de Cabat conservés à la Fondation Custodia sont datés de la seconde moitié des années 1830, moment charnière dans le développement de sa manière. Élève de Camille Flers (1802–1868), Cabat se laissa d’abord attirer par l’approche innovante du paysage réaliste, qu’il expérimenta dans les environs franciliens à partir de 1829-1830. En 1834, à la suite de sa rencontre avec le père Lacordaire (1802–1861), Cabat se convertit au catholicisme. Cette rupture avec son éducation athée l’engagea à considérer le monde qui l’entourait autrement et coïncida avec son départ pour l’Italie, en 18364. Le voyage et la découverte des vastes étendues de la campagne romaine acheva de bouleverser son approche du paysage. Il abandonna une vision anecdotique pour une conception plus noble de la nature. Il devint l’un des tenants de la tendance idéaliste qui rassemblait alors Caruelle d’Aligny (1798–1871), Édouard Bertin (1797–1871), les frères Benouville et les frères Flandrin, Félix Hippolyte Lanoüe (1812–1872), Alexandre Desgoffe (1805–1882) et Alfred de Curzon (1820–1895). Louis Cabat campa vigoureusement ce paysage immense et splendide de la plaine de Narni, un de ses sites privilégiés lors de ses premiers séjours dans la péninsule. Cette manière est caractéristique de ses grandes études italiennes. Le cavalier, seul et dominé par la nature et le bouillonnement blanc des nuages, traduit un sentiment presque existentialiste, voire mystique. Cabat connut un succès certain auprès du public et de la critique qui vit en lui le chef de file d’une nouvelle école de paysage trouvant son équilibre entre le genre historique hérité de la tradition classique et l’intérêt pour l’observation réaliste de la nature5. À partir de la seconde moitié des années 1845, Lacordaire conseilla à Cabat de retourner au monde laïc6. Le peintre se maria et, dans le même temps, son art prit une teinte plus noble et apaisée. Commença alors sa longue carrière qui le porta, en 1878, à la direction de l’Académie de France à Rome. Maud Guichané 1Elle possède à ce jour cinq études peintes à l’huile sur papier, vingt-six dessins et plusieurs centaines de pièces autographes, documentaires et de la correspondance de Cabat. 2Pierre Miquel fut l’un des fondateurs de l’étude du paysage français du XIXe siècle ; voir notamment sa série L’École de la nature. Le Paysage français au XIXe siècle, Maurs-La-Jolie, 11 vols., 1975-1996. 3Elle publia une petite mais riche monographie sur l’artiste : Chantal Kiener et Carole Rabiller, Louis-Nicolas Cabat (1812-1893). Études en plein air circa 1837-1852, cat. exp. Paris (galerie Chantal Kiener), 2020. Chantal Kiener organisa aussi une exposition sur l’artiste à la galerie La Nouvelle Athènes, Paris, à l’occasion du Salon du Dessin 2022. 4Miquel 1975-1996, op. cit. (note 2), vol. III, 1975, p. 489-491 ; Kiener et Rabiller 2020, op. cit. (note 3), p. 22-24. Avec le père Lacordaire, il prit part à la Confrérie de Saint-Jean qui cherchait à rétablir l’application chrétienne de l’art. 5Ce que Pierre Miquel désigne comme « l’école du paysage académico-réaliste » : Miquel 1975-1996, op. cit. (note 2), vol. III, 1975, p. 496. Voir aussi Kiener et Rabiller 2020, op. cit. (note 3), p. 24. 6Miquel 1975-1996, op. cit. (note 2), vol. III, 1975, p. 497.
Ce dessin a été choisi dans le fonds conséquent d’œuvres de Louis Cabat conservé à la Fondation Custodia et dont une large majorité a été acquise sous le directorat de Ger Luijten1. Il fut acheté auprès de la galeriste parisienne Chantal Kiener qui, dans la droite ligne de Pierre Miquel2, s’est évertuée à rendre à Cabat la place qu’il méritait dans le panorama des paysagistes français3. Fine connaisseuse de la période, elle rassembla tout au long de sa carrière des œuvres de l’artiste, en vendit et en donna un grand nombre à la Fondation Custodia. Tous les dessins de Cabat conservés à la Fondation Custodia sont datés de la seconde moitié des années 1830, moment charnière dans le développement de sa manière. Élève de Camille Flers (1802–1868), Cabat se laissa d’abord attirer par l’approche innovante du paysage réaliste, qu’il expérimenta dans les environs franciliens à partir de 1829-1830. En 1834, à la suite de sa rencontre avec le père Lacordaire (1802–1861), Cabat se convertit au catholicisme. Cette rupture avec son éducation athée l’engagea à considérer le monde qui l’entourait autrement et coïncida avec son départ pour l’Italie, en 18364. Le voyage et la découverte des vastes étendues de la campagne romaine acheva de bouleverser son approche du paysage. Il abandonna une vision anecdotique pour une conception plus noble de la nature. Il devint l’un des tenants de la tendance idéaliste qui rassemblait alors Caruelle d’Aligny (1798–1871), Édouard Bertin (1797–1871), les frères Benouville et les frères Flandrin, Félix Hippolyte Lanoüe (1812–1872), Alexandre Desgoffe (1805–1882) et Alfred de Curzon (1820–1895). Louis Cabat campa vigoureusement ce paysage immense et splendide de la plaine de Narni, un de ses sites privilégiés lors de ses premiers séjours dans la péninsule. Cette manière est caractéristique de ses grandes études italiennes. Le cavalier, seul et dominé par la nature et le bouillonnement blanc des nuages, traduit un sentiment presque existentialiste, voire mystique. Cabat connut un succès certain auprès du public et de la critique qui vit en lui le chef de file d’une nouvelle école de paysage trouvant son équilibre entre le genre historique hérité de la tradition classique et l’intérêt pour l’observation réaliste de la nature5. À partir de la seconde moitié des années 1845, Lacordaire conseilla à Cabat de retourner au monde laïc6. Le peintre se maria et, dans le même temps, son art prit une teinte plus noble et apaisée. Commença alors sa longue carrière qui le porta, en 1878, à la direction de l’Académie de France à Rome. Maud Guichané 1Elle possède à ce jour cinq études peintes à l’huile sur papier, vingt-six dessins et plusieurs centaines de pièces autographes, documentaires et de la correspondance de Cabat. 2Pierre Miquel fut l’un des fondateurs de l’étude du paysage français du XIXe siècle ; voir notamment sa série L’École de la nature. Le Paysage français au XIXe siècle, Maurs-La-Jolie, 11 vols., 1975-1996. 3Elle publia une petite mais riche monographie sur l’artiste : Chantal Kiener et Carole Rabiller, Louis-Nicolas Cabat (1812-1893). Études en plein air circa 1837-1852, cat. exp. Paris (galerie Chantal Kiener), 2020. Chantal Kiener organisa aussi une exposition sur l’artiste à la galerie La Nouvelle Athènes, Paris, à l’occasion du Salon du Dessin 2022. 4Miquel 1975-1996, op. cit. (note 2), vol. III, 1975, p. 489-491 ; Kiener et Rabiller 2020, op. cit. (note 3), p. 22-24. Avec le père Lacordaire, il prit part à la Confrérie de Saint-Jean qui cherchait à rétablir l’application chrétienne de l’art. 5Ce que Pierre Miquel désigne comme « l’école du paysage académico-réaliste » : Miquel 1975-1996, op. cit. (note 2), vol. III, 1975, p. 496. Voir aussi Kiener et Rabiller 2020, op. cit. (note 3), p. 24. 6Miquel 1975-1996, op. cit. (note 2), vol. III, 1975, p. 497.