Accueil Catalogues en ligne Art sur papier. Acquisitions récentes 7. Christian Brune Paris 1793 – 1849 Paris Vue du Pont de Sèvres, 1819 Élève de Jean-Victor Bertin (1767-1842), Christian Brune enseigne à partir de 1817 la topographie et le paysage à l’École Royale Polytechnique. Il rédigera par ailleurs un Tableau démonstratif des écritures adoptées pour les cartes topographiques, chorographiques et géographiques à l’usage des élèves de l’École royale Polytechnique, illustré de gravures d’après ses dessins1. Pendant son professorat, Brune dessine et peint de nombreuses vues des environs de Paris, dont Bellevue, Meudon, Ville d’Avray, Saint-Cloud et Sèvres. Le vieux pont de Sèvres, édifié sous le règne de Louis XIV, tandis que la cour venait de s’installer à Versailles, était en ce temps l’unique point de traversée de la Seine sur l’axe reliant Paris et la cité royale. Son architecture de bois était portée par deux arches de pierre de part et d’autre du fleuve et l’artiste s’est placé sous celle de la rive droite. Napoléon Ier fit construire par la suite, en amont du pont originel, le nouveau pont de Sèvres en pierre, que l’on aperçoit à l’arrière-plan de notre dessin. L’angle de vue, qui donne une place centrale à l’architecture du pont, confère à ce paysage fluvial un cadre cintré, artifice de composition qui n’est pas sans rappeler les dessins de François-Édouard Bertin (voir cat. n° 3), lui aussi formé par Jean-Victor Bertin. Brune se distingue en faisant de ce motif un dispositif théâtral, à la manière des piranésiens du siècle précédent. Il joue ainsi du contraste induit par l’ombre portée du pont et le paysage baigné de soleil, et place le point de fuite dans le tiers inférieur de la composition afin de monumentaliser l’arche du vieux pont. Cette vue très ordonnée et équilibrée – que Brune, en bon topographe, construit selon une géométrie rigoureuse – n’est pas pour autant dépourvue de détails pittoresques : les vieilles planches, les sillons laissés par les roues des chariots, les figures d’ouvriers déchargeant le bateau. En cadrant ainsi sa composition, Brune invite aussi le spectateur à une lecture plus métaphorique de ce paysage : sous l’arche de l’ancien pont se profile la silhouette du nouveau, comme un raccourci visuel entre passé et présent. Exposée lors de sa deuxième participation au Salon, en 1819 – avec une Vue du château de Coucy (n° 184) et plusieurs autres paysages non décrits (n° 185) – notre Vue du Pont de Sèvres est une œuvre que le jeune artiste souhaitait valoriser comme démonstration de ses talents de topographe et de paysagiste. Cette aquarelle étonne aujourd’hui encore par son format. Comme le notait Charles Gabet2, Brune exécutait volontiers « des aquarelles de la plus grande dimension. » Notre dessin, qui doit figurer parmi les plus grands réalisés par l’artiste, revêt ainsi l’ambition picturale d’un tableau. MNG 1Publié à Paris vers 1842 ; un exemplaire se trouve à Paris, Bibliothèque nationale de France, inv. GE DD-5362. 2Ch. Gabet, Dictionnaire des artistes de l’école française au XIXe siècle, Paris, 1831, p. 104.
Élève de Jean-Victor Bertin (1767-1842), Christian Brune enseigne à partir de 1817 la topographie et le paysage à l’École Royale Polytechnique. Il rédigera par ailleurs un Tableau démonstratif des écritures adoptées pour les cartes topographiques, chorographiques et géographiques à l’usage des élèves de l’École royale Polytechnique, illustré de gravures d’après ses dessins1. Pendant son professorat, Brune dessine et peint de nombreuses vues des environs de Paris, dont Bellevue, Meudon, Ville d’Avray, Saint-Cloud et Sèvres. Le vieux pont de Sèvres, édifié sous le règne de Louis XIV, tandis que la cour venait de s’installer à Versailles, était en ce temps l’unique point de traversée de la Seine sur l’axe reliant Paris et la cité royale. Son architecture de bois était portée par deux arches de pierre de part et d’autre du fleuve et l’artiste s’est placé sous celle de la rive droite. Napoléon Ier fit construire par la suite, en amont du pont originel, le nouveau pont de Sèvres en pierre, que l’on aperçoit à l’arrière-plan de notre dessin. L’angle de vue, qui donne une place centrale à l’architecture du pont, confère à ce paysage fluvial un cadre cintré, artifice de composition qui n’est pas sans rappeler les dessins de François-Édouard Bertin (voir cat. n° 3), lui aussi formé par Jean-Victor Bertin. Brune se distingue en faisant de ce motif un dispositif théâtral, à la manière des piranésiens du siècle précédent. Il joue ainsi du contraste induit par l’ombre portée du pont et le paysage baigné de soleil, et place le point de fuite dans le tiers inférieur de la composition afin de monumentaliser l’arche du vieux pont. Cette vue très ordonnée et équilibrée – que Brune, en bon topographe, construit selon une géométrie rigoureuse – n’est pas pour autant dépourvue de détails pittoresques : les vieilles planches, les sillons laissés par les roues des chariots, les figures d’ouvriers déchargeant le bateau. En cadrant ainsi sa composition, Brune invite aussi le spectateur à une lecture plus métaphorique de ce paysage : sous l’arche de l’ancien pont se profile la silhouette du nouveau, comme un raccourci visuel entre passé et présent. Exposée lors de sa deuxième participation au Salon, en 1819 – avec une Vue du château de Coucy (n° 184) et plusieurs autres paysages non décrits (n° 185) – notre Vue du Pont de Sèvres est une œuvre que le jeune artiste souhaitait valoriser comme démonstration de ses talents de topographe et de paysagiste. Cette aquarelle étonne aujourd’hui encore par son format. Comme le notait Charles Gabet2, Brune exécutait volontiers « des aquarelles de la plus grande dimension. » Notre dessin, qui doit figurer parmi les plus grands réalisés par l’artiste, revêt ainsi l’ambition picturale d’un tableau. MNG 1Publié à Paris vers 1842 ; un exemplaire se trouve à Paris, Bibliothèque nationale de France, inv. GE DD-5362. 2Ch. Gabet, Dictionnaire des artistes de l’école française au XIXe siècle, Paris, 1831, p. 104.