18. Franciscus Andreas Milatz

Haarlem 1763 – 1808 Haarlem

Une forêt aux environs de Bloemendaal, vers 1779-1808

« Entrez donc, ô jeune peintre ! dans les bois ou montez les collines afin de peindre des perspectives boisées, ou d’engranger, […] la riche nature dans votre carnet de dessins. » recommandait ainsi en 1678 Samuel van Hoogstraten (1627–1687) aux jeunes artistes1. De fait, au XVIIe siècle, aux Pays-Bas, sortir de l’atelier était perçu comme formateur et nombreux furent les peintres à parcourir le monde. Abandonnant destinations lointaines et exotiques, les paysagistes néerlandais du XVIIIe siècle se tournèrent de nouveau vers leur pays, soucieux de décrire une nature à portée d’atelier2. Paulus van Liender (1731–1797) croqua ainsi les forêts autour d’Haarlem tandis qu’Egbert van Drielst (1745–1818) préféra les paysages ligneux de la Drenthe.

Franciscus Andreas Milatz suivit leurs pas. Né à Haarlem, l’artiste entra dans les années 1780 dans l’atelier de Van Liender, où il suivit une formation de dessinateur et de graveur. Avec des contemporains comme Pieter Barbiers II (1749–1842) et Hermanus van Brussel (1763–1815), Milatz fut un important protagoniste du genre du dessin de paysage néerlandais, qui connut un renouveau au cours de la période 1780-18103. Redevable à ses éminents prédécesseurs du Siècle d’or tels que Jacob van Ruisdael (1628–1682) et Meindert Hobbema (1638–1709), l’artiste représenta des scènes densément boisées, peuplées d’arbres monumentaux et noueux, comme celui qui domine notre composition.

Tirant profit du grand format de sa feuille, Milatz plaça au cœur de sa composition un arbre immense dont les branches tourmentées confèrent des accents dramatiques à son dessin. L’effet en est d’autant plus saisissant que ce jeu subtil de lignes obliques allant de la droite vers la gauche se retrouve souligné par d’autres frondaisons, la berge du ruisseau et la main levée de l’homme assis au premier plan. Le tout est contrebalancé par un second réseau de lignes obliques, cette fois-ci de la gauche vers la droite et initié par le pont, les branchages sur la droite et le bras levé de l’homme assis à l’arrière-plan auprès d’un comparse debout. Esquissés avec des traits vifs, ces derniers apparaissent minuscules, comme happés par une nature conquérante qui reprend ainsi la première place.

L’acquisition de cet impressionnant paysage de Milatz témoigne des efforts de Ger Luijten pour élargir le fonds de dessins hollandais du XVIIIe siècle de la Fondation Custodia. Sous sa direction, cette collection s’est enrichie de plus de vingt-cinq feuilles, dont un monumental Paysage avec cavaliers et voyageurs de Van Drielst et deux délicates aquarelles du professeur de Milatz, Van Liender4.

Aude Prigot

1Samuel van Hoogstraten, Inleyding tot de hooge schoole der schilderkonst : anders de zichtbaere werelt, Rotterdam, 1678, p. 139 : « Tre dan, ô Schilderjeucht ! ten boschwaert in, of langs de heuvelen op, om verre verschieten, of boomrijke gezichten af te maelen of […] de rijke natuer in uw tekenboek op te gaeren. »).

2Stefaan Hautekeete (dir.), Cabinet des plus merveilleux dessins : dessins néerlandais du XVIIIe siècle issus des collections des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, cat. exp. Bruxelles (Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique), Enschede (Rijksmuseum Twenthe), Paris (Fondation Custodia), 2019-2021, p. 10-11.

3Angelique Beerenhout, « Herhalingen in het getekende oeuvre van F. A. Milatz », Delineavit et Sculpsit, vol. XVI, 1996, p. 44.

4Egbert van Drielst, Paysage avec cavaliers et voyageurs, 1778, pointe du pinceau et encre grise, lavis gris, sur un tracé à la pierre noire, 395 × 575 mm, inv. 2013-T.11 ; Paulus van Liender, Scène pittoresque dans les bois et Scène pittoresque dans les bois, avec ruines, 1791, pendants, aquarelle, sur un tracé au graphite, 317 × 286 mm, inv. 2018-T.21 and 2018-T.22. D’autres acquisitions importantes concernent des œuvres d’Isaac de Moucheron (1667–1744), Daniel Dupré (1751–1817) et Cornelis Pronk (1691–1759, voir cat. 17).