Accueil Catalogues en ligne Art sur papier. Acquisitions récentes 24. Louis Jean Desprez Auxerre 1743 – 1804 Stockholm Indulgences plénières, vers 1790 Ces deux estampes monumentales de Louis Jean Desprez – architecte, peintre et décorateur de théâtre français –, sans doute conçues comme des pendants, tournent en dérision à la fois la religion catholique et la médecine1. Les Indulgences plénières (voir cat. n° 24) offrent une allusion satirique au rituel catholique de l’indulgence, qui fait l’objet de critiques depuis la Réforme. Au premier plan, un prêtre encapuchonné, tenant deux dindes dans ses mains, est transporté par d’autres ecclésiastiques. La scène est une parodie de la procession pascale, au cours de laquelle une statue de saint est portée à travers les rues le Vendredi Saint. Sur les marches qui conduisent à l’église, des pénitents sont bénis ou flagellés, tandis que d’autres endurent les souffrances du Christ en portant sa Croix. Toute la situation est rendue ridicule par la présence de l’âne au premier plan, qui semble se rouler par terre en s’esclaffant. La Promotion médicale (voir cat. n° 25) moque quant à elle les médecins et leur croyance aux bienfaits du clystère, un instrument médical employé surtout pour le lavage des intestins. Jusqu’au XIXe siècle, les clystères purgatifs étaient fréquemment prescrits pour soulager un grand éventail de maux, tels que les douleurs d’estomac et la constipation. C’était également un remède associé au charlatanisme et souvent moqué au théâtre, par exemple dans Le Malade imaginaire (1673) de Molière. Desprez a porté ce thème à un autre niveau. La gravure évoque une étrange cérémonie, ayant lieu une place entourée de hautes bâtisses et d’une église à l’aspect gothique. Debout devant son lutrin sur une plateforme élevée, Pantalone, le personnage de la Commedia dell’arte, explique au public les bienfaits du clystère. L’un de ses patients est Pulcinella, assis sur une chaise percée et tenant un flacon avec un contenu qui fume. À droite, un âne et une foule de patients, couchés sur le dos, offrant leurs fesses dénudées, s’apprêtent à recevoir le remède. Desprez a fait ces gravures à Stockholm, où il a passé les vingt dernières années de sa vie, travaillant pour le roi Gustave III de Suède (r. 1771-1792). Celui-ci avait repéré le talent de l’artiste à Rome, où il travaillait avec Francesco Piranèse (1758-1810), et avait fait des dessins pour le célèbre Voyage pittoresque, ou description des royaumes de Naples et Sicile de Jean-Claude Richard de Saint-Non (1727-1791). Formé comme architecte à l’Académie Royale d’Architecture à Paris, Desprez était passé maître dans les vues de Rome avec des ruines et des monuments, les vues de villes et les intérieurs d’églises, qu’il animait souvent de foules bigarrées. Indulgences plénières et Promotion médicale, que l’artiste a lui-même colorées à la main, représentent un genre assez particulier dans l’œuvre de l’artiste. Elles ont sans doute plu à un petit groupe d’admirateurs qui – à l’instar de Desprez – incarnaient les Lumières et ne s’offusquaient pas devant des images sacrilèges ou des fesses nues. MR 1Deux autres paires se trouvent à Amsterdam, Rijksmuseum, inv. RP-P-2002-190 (eau-forte, lavis gris ; 555 × 875 mm) ; et RP-P-2010-73 (eau-forte, aquarelle ; 620 × 945 mm) ; « Keuze uit de aanwinsten : achttiende-eeuwse prenten », Bulletin van het Rijksmuseum, LIII, 2005, n° 3, p. 335-336, n° 8, repr. ; Huigen Leeflang, « Acquisitions : The Print Room. Uncommon prints from the collection of Jan van der Waals », The Rijksmuseum Bulletin, LIX, 2011, n° 2, p. 192-193, n° 3, repr. ; https://www.rijksmuseum.nl/nl/zoeken ; et à Stockholm, Nationalmuseum, inv. NMG 1032/1869 (eau-forte, aquarelle ; 580 × 872 mm) ; et NMG 1033/1869 (eau-forte, aquarelle ; 570 × 877 mm) ; Magnus Olausson et al., La Chimère de Monsieur Desprez, cat. exp., Paris, Musée du Louvre, 1994, p. 176, fig. 46-47 ; http://collection.nationalmuseum.se.
Ces deux estampes monumentales de Louis Jean Desprez – architecte, peintre et décorateur de théâtre français –, sans doute conçues comme des pendants, tournent en dérision à la fois la religion catholique et la médecine1. Les Indulgences plénières (voir cat. n° 24) offrent une allusion satirique au rituel catholique de l’indulgence, qui fait l’objet de critiques depuis la Réforme. Au premier plan, un prêtre encapuchonné, tenant deux dindes dans ses mains, est transporté par d’autres ecclésiastiques. La scène est une parodie de la procession pascale, au cours de laquelle une statue de saint est portée à travers les rues le Vendredi Saint. Sur les marches qui conduisent à l’église, des pénitents sont bénis ou flagellés, tandis que d’autres endurent les souffrances du Christ en portant sa Croix. Toute la situation est rendue ridicule par la présence de l’âne au premier plan, qui semble se rouler par terre en s’esclaffant. La Promotion médicale (voir cat. n° 25) moque quant à elle les médecins et leur croyance aux bienfaits du clystère, un instrument médical employé surtout pour le lavage des intestins. Jusqu’au XIXe siècle, les clystères purgatifs étaient fréquemment prescrits pour soulager un grand éventail de maux, tels que les douleurs d’estomac et la constipation. C’était également un remède associé au charlatanisme et souvent moqué au théâtre, par exemple dans Le Malade imaginaire (1673) de Molière. Desprez a porté ce thème à un autre niveau. La gravure évoque une étrange cérémonie, ayant lieu une place entourée de hautes bâtisses et d’une église à l’aspect gothique. Debout devant son lutrin sur une plateforme élevée, Pantalone, le personnage de la Commedia dell’arte, explique au public les bienfaits du clystère. L’un de ses patients est Pulcinella, assis sur une chaise percée et tenant un flacon avec un contenu qui fume. À droite, un âne et une foule de patients, couchés sur le dos, offrant leurs fesses dénudées, s’apprêtent à recevoir le remède. Desprez a fait ces gravures à Stockholm, où il a passé les vingt dernières années de sa vie, travaillant pour le roi Gustave III de Suède (r. 1771-1792). Celui-ci avait repéré le talent de l’artiste à Rome, où il travaillait avec Francesco Piranèse (1758-1810), et avait fait des dessins pour le célèbre Voyage pittoresque, ou description des royaumes de Naples et Sicile de Jean-Claude Richard de Saint-Non (1727-1791). Formé comme architecte à l’Académie Royale d’Architecture à Paris, Desprez était passé maître dans les vues de Rome avec des ruines et des monuments, les vues de villes et les intérieurs d’églises, qu’il animait souvent de foules bigarrées. Indulgences plénières et Promotion médicale, que l’artiste a lui-même colorées à la main, représentent un genre assez particulier dans l’œuvre de l’artiste. Elles ont sans doute plu à un petit groupe d’admirateurs qui – à l’instar de Desprez – incarnaient les Lumières et ne s’offusquaient pas devant des images sacrilèges ou des fesses nues. MR 1Deux autres paires se trouvent à Amsterdam, Rijksmuseum, inv. RP-P-2002-190 (eau-forte, lavis gris ; 555 × 875 mm) ; et RP-P-2010-73 (eau-forte, aquarelle ; 620 × 945 mm) ; « Keuze uit de aanwinsten : achttiende-eeuwse prenten », Bulletin van het Rijksmuseum, LIII, 2005, n° 3, p. 335-336, n° 8, repr. ; Huigen Leeflang, « Acquisitions : The Print Room. Uncommon prints from the collection of Jan van der Waals », The Rijksmuseum Bulletin, LIX, 2011, n° 2, p. 192-193, n° 3, repr. ; https://www.rijksmuseum.nl/nl/zoeken ; et à Stockholm, Nationalmuseum, inv. NMG 1032/1869 (eau-forte, aquarelle ; 580 × 872 mm) ; et NMG 1033/1869 (eau-forte, aquarelle ; 570 × 877 mm) ; Magnus Olausson et al., La Chimère de Monsieur Desprez, cat. exp., Paris, Musée du Louvre, 1994, p. 176, fig. 46-47 ; http://collection.nationalmuseum.se.