III. Composer

En Italie, jusqu’au XIXe siècle, la plupart des œuvres d’art étaient créées en réponse à une commande, passée souvent par l’Église, les institutions, les princes ou les élites de la société. Le contrat, qui liait commanditaire et artiste, en spécifiait des éléments tels que l’iconographie, le nombre de figures, les matériaux à employer, le prix mais aussi le lieu destiné à recevoir l’œuvre.
Dès ses dessins préparatoires, l’artiste tenait compte de ces paramètres et du cadre dans lequel la peinture devait s’inscrire. Les études de composition étaient en effet vouées à définir la disposition et le rapport des figures, en fonction du format et de l’emplacement de l’œuvre à venir. Sur ces feuilles, des indices tels que la forme de l’encadrement, les éléments architecturaux, le choix d’un certain angle de vue, nous permettent de déterminer s’il s’agit de dessins préparatoires à une sculpture ou un tableau, une fresque pour la lunette d’un cloître, un retable ou le décor monumental d’un palazzo.


[L’artista] habbisi risguardo bene al luogo dove [l’opera] và collocata, o’ dipinta [...], percioche le più volte il lume non buono, la molta altezza, & la lontananza di quelle, fa rimanere ingannati etiandio gli espertissimi [...], & percio si vada più, & più volte à quel luogo, & quivi se l’imagini veder come dipinta, & la misuri col discorso, & come le figure principali debbano essere à voler che si mostrino à par del vivo.

[L’artiste] doit s’aviser de bien regarder le lieu où elle [l’œuvre] sera située, ou peinte [...] car souvent la mauvaise lumière, la grande hauteur, & la distance trompent les plus experts ; vous irez donc encore et encore en ce lieu, et vous comparerez la composition peinte avec votre histoire et la manière dont les figures principales devraient être disposées pour paraître vivantes.

Giovanni Battista Armenini, De veri precetti della pittura, Ravennes, 1587