18. Abraham van Diepenbeeck

Bois-le-Duc 1596 – 1675 Anvers

Étude d’une famille sur un perron

Les nombreux dessins préparatoires qu’Abraham van Diepenbeeck exécuta pour ses peintures et gravures révèlent sa façon méthodique de travailler. Après une première esquisse, souvent hâtivement tracée, parfois suivie d’une variante un peu plus élaborée, l’artiste faisait un modello minutieusement détaillé qu’il accompagnait parfois d’une esquisse à l’huile en grisaille1. Ce dessin d’une famille se tenant debout sur un perron appartient à la première catégorie. L’esquisse nerveuse trahit encore les doutes du dessinateur. La répétition des lignes et leurs divergences permettent de suivre d’assez près les réflexions de Van Diepenbeeck. Le chapeau du père a ainsi deux positions différentes et la tête de la mère est dirigée aussi bien vers l’avant que sur le côté.

Le modello réalisé d’après cette esquisse se trouve à Weimar2. Pour aboutir à cette variante détaillée, Van Diepenbeeck a très probablement repassé les contours de son dessin au stylet pour le report. Par rapport à la feuille de la Fondation Custodia, quelques changements sont à signaler. La fillette ne tient plus son panier à la main, mais le porte sous son bras. Le père ne regarde plus sa femme mais a les yeux tournés vers son fils qui marche devant lui, tandis qu’un château apparaît également dans le jardin à l’arrière-plan. On n’a trouvé aucune trace du portrait de famille peint auquel le dessin a donné lieu. Fait notable, il existe un tableau un peu plus tardif avec un groupe familial qui suit dans les grandes lignes la composition de Van Diepenbeeck3. On ignore si son auteur avait eu connaissance du (des) dessin(s) ou s’il a réalisé une variante de la version peinte aujourd’hui perdue.

La famille de notre dessin a initialement été identifiée comme celle de Charles Ier d’Angleterre (1600-1649)4. Il est toutefois peu probable que Van Diepenbeeck ait peint leur portrait, d’autant plus que son séjour en Angleterre ne peut être prouvé5. D’autres ont avancé le nom de William Cavendish (1592-1676) et de sa famille6. Entre 1648 et 1660, Cavendish et sa deuxième épouse, Margaret, née Lucas (1623-1673), étaient en exil à Anvers où ils séjournèrent dans l’ancienne maison du peintre Peter Paul Rubens (1577-1640)7. Le couple a confié différentes commandes à Van Diepenbeeck ; ce dernier a ainsi réalisé les illustrations de La Méthode Nouvelle et Invention Extraordinaire de dresser les Chevaux (1658) de Cavendish, et certaines des livres écrits par Margaret8. Mais les enfants de Cavendish – issus de son premier mariage – avaient déjà atteint l’âge adulte à l’époque9.

MvS

1Hans Vlieghe, «  Abraham van Diepenbeeck (1596-1675)  », dans Paul Huys Janssen (éd.), Meesters van het Zuiden. Barokschilders rondom Rubens, cat. exp., Bois-le-Duc, Noordbrabants Museum, 2000, p. 57-58  ; voir Stefaan Hautekeete (éd.), From Floris to Rubens. Master Drawings from a Belgian Private Collection, cat. exp., Anvers, Musée Royal des Beaux-Arts de Belgique et Maastricht, Bonnefantenmuseum, n° 77.

2Klassik Stiftung Weimar, inv GHz/Sch.I.XVIII,13  ; une copie très proche d’après le dessin de Weimar a été vendue par la Galerie Jean-Marie Le Fell, Dessins anciens - catalogue no 7, n° 13 et semble être la feuille que Frits Lugt considérait comme étant une copie d’après son dessin (RKD Hofstede de Groot, fiche n° 1361303 – attribué à Daniel Mijtens (vers 1590-1647/1648)).

3Anonyme, Portrait de Hendrick de Sandra, Margaretha Tortarolis et Anna Maria de Sandra, vers 1660, huile sur toile, 62,5 × 80,5 cm, collection privée.

4Cat. exp. Londres/Paris/Berne/Bruxelles 1972, n° 23  ; RKD Hofstede de Groot, fiche n° 1114141.

5Hans Vlieghe, «  Abraham van Diepenbeeck (1596-1675)  », dans Paul Huys Janssen (éd.), Meesters van het Zuiden. Barokschilders rondom Rubens, cat. exp., Bois-le-Duc, Noordbrabants Museum, 2000, p. 61.

6Documentation et correspondance, Fondation Custodia, Paris  ; le dessin conservé à la Klassik Stiftung Weimar porte toujours le titre Cavendish, William 1er duc de Newcastle (1592-1676) avec sa famille.

7Ben van Beneden et Nora De Poorter (éds.), Royalist Refugees. William and Margaret Cavendish in the Rubens House 1648-1660, cat. exp., Anvers, Rubenshuis, 2006.

8Poems and Fancies (1653), Philosophical and Physical (1655), The Worlds Olio (1655), Natures Pictures drawn by Fancies Pencil to the Life (1656) et A True Relation of my Birth, Breading and Life (1656).

9Cavendish et Margaret n’eurent pas d’enfants. Le dessin de Diepenbeeck de William Cavendish et sa famille (British Museum, Londres, inv. 1858,0417.1629) utilisé pour les Natures Pictures drawn by Fancies Pencil to the Life… de Margaret et gravé par Peeter Clouet (Hollstein IV, n° 15) représente probablement Henry (adulte), le fils de William (1630-1691) et son épouse Frances Pierrepont.

10Pour la transcription, voir cat. exp. Londres/Paris/Berne/Bruxelles 1972, n° 23.